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22 novembre 2006 3 22 /11 /novembre /2006 18:03

L’actualité des réparations

nota: cette commande d'un bihebdomadaire arménien n'a pas été publié en fin de compte...

 

Le 25 octobre 2000, un rapport sur la Turquie est présenté par M. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial de la Commission des Droits de l'Homme, lors de la 55ème session de l'Assemblée générale des Nations Unies: il s’agit des conclusions d’une mission d’experts indépendants décidée en 1995 et entreprise du 30 novembre au 9 décembre 1999 à Ankara, Istanbul et Mardin dans le sud-est de la Turquie et qui énonce le fait suivant : « selon ces experts, le parti Ittihat souhaitait créer une bourgeoisie nationaliste turque mais, face aux difficultés d'un tel projet, a profité des conditions de la première guerre mondiale pour éliminer en grande partie, en 1915, la communauté arménienne, et par la même, confisquer leurs biens et propriétés transférés à une nouvelle élite locale. »

Pour la première fois dans les annales onusiennes, la confiscation des biens arméniens est explicitement reconnue au niveau international, mentionnant de surcroît les responsables de ces expropriations, les moyens mis en œuvre, et le but recherché.

Dès lors, le volet des réparations acquiert une dimension primordiale dans la question arménienne, matérialisée, par exemple, par les retentissants procès intentés ces dernières années par les avocats californiens Mark Geragos et Brian Kabateck devant le tribunal de Californie et qui ont aboutis, d’une part, au versement en 2000 de 20 millions d’euros par le New York Life Insurance Company, et, d’autre part, en 2005, par une indemnisation de 14,4 millions d’euros négociée avec Axa (dont 11 millions ont été reversés à un fonds d’indemnisation et trois millions à des organisations caritatives arméniennes en France).

Pourtant, de leur propre aveu, les principales actions restent à venir : fin 2005, de passage à Paris pour finaliser l’accord avec Axa, les deux avocats ont dit détenir  « des preuves irréfutables » contre la Deutsche Bank ,  basée anciennement dans l’Empire ottoman sous le nom de « Deutsche Bank of Orient » et aujourd’hui première banque privée allemande. Cette fois-ci, ce ne sont plus des assurances-vie qui sont visées, mais « des dépôts d’argent, des coffres qui contenaient de l’argent liquide, des bijoux... » a précisé Me Kabateck. Me Geragos a ajouté que d’autres plaintes visant d’autres banques devraient suivre.

Parallèlement, les procès contre les assureurs sont amenés à se poursuivre, puisqu’une plainte a été déposée contre l’assureur Victoria, filiale du numéro deux allemand des assurances ERGO. « Une plainte bloquée parce que le gouvernement allemand est intervenu » qui n’a pas pu être « légalement  signifiée à Victoria », a indiqué Me Kabateck.

 

Par ailleurs, ceux-ci ont déclarés préparer « une action contre le gouvernement turc, concernant ce que les Turcs ont pris aux Arméniens, des biens, des propriétés ».

Ce qui serait un véritable tournant, puisque jamais encore le gouvernement turc n’a directement été inquiété par ces demandes de restitutions.

D’après certaines sources, les avocats comptent atteindre le gouvernement turc à travers une des actions intentées contre les banques, sachant que les gouvernements turcs de l’époque avaient tentés à plusieurs reprises de reprendre (avec succès ?) l’argent déposé dans les banques européennes par les arméniens tués [cf. FOCUS] arguant du fait que les arméniens, morts et sans héritiers, étaient des citoyens turcs dont l’argent ne pouvait logiquement revenir en dernier lieu qu’à l’État turc ; à l’image de Talaat demandant à l’ambassadeur américain H. Morgenthau d’intervenir auprès de la New York Life Insurance Company et de l’Equitable Life of New York pour qu’elles lui remettent la liste complète de leurs clients arméniens.

Ce volet financier des biens arméniens est l’angle le plus pragmatique et le plus pratique des réparations, ce qui en fait la partie la plus facile à mettre en œuvre : d’après des études qu’aurait effectué Laurenti Barseghian, directeur du Musée du génocide arménien de Yerevan[1], l'évaluation du préjudice financier subit par les arméniens à la suite du génocide de 1915 serait de l’ordre de $ 45 -50 milliards. Selon d’autres études, le total global des dommages s'élèverait, en francs de 1919, à 14,5 milliards. En francs d'aujourd'hui, cela se compterait en millions de milliards ![2]

 

 

Mais les réparations ne se limitent pas à de simples calculs d’apothicaires. Ce sont aussi et surtout un patrimoine et des propriétés qui, dans certains cas, font l’objet de traités signés avec l’administration ottomane. Les biens patriarcaux sont tout particulièrement concernés, puisqu’un inventaire, en 1914, les a précisément répertoriés[3]: les archives inédites du Patriarcat arménien de Constantinople pour les années 1913-1914 font ainsi état de 2538 églises, 451 monastères et 1996 écoles. « Aujourd'hui, en dehors d'Istanbul, les Arméniens ne possèdent que six églises, aucun monastère et aucune école », note Dickran Kouyoumjian, auteur du seul véritable travail de synthèse concernant les biens arméniens réalisé à ce jour.

Où sont donc passés ces 2500 églises ? Dans quelle mesure ce patrimoine peut-il aujourd’hui être sauvé ?

A défaut de pouvoir répondre à cette question, faute de l’existence d’un travail comparatif digne de ce nom sur la question des réparations, ces quelques données ont le mérite de nous permettre de nous rendre compte en quoi ce type de travail, de longue haleine, peut ouvrir de nouvelles perspectives dans le cadre du règlement de la question arménienne et parvenir, à terme, à ramener à la réalité tout un pan de nos possessions passées, pour préserver enfin ce qui peut l’être encore.

(cf. page ci-dessous pour le FOCUS et LES FAITS)

 

 

LES FAITS :

Les biens expropriés des populations arméniennes, à l’issue du génocide, vont aux populations turques voisines, par le biais de ventes fictives : « Les notables, qui avaient prospéré par le pillage, craignaient que les Arméniens reviennent récupérer leurs biens et se venger. Ce qui s’est effectivement produit, par exemple, dans la région de Cukurova, où les Arméniens survivants sont revenus avec les forces d’occupation pour reprendre ce qui leur appartenait. », relate Taner Akçam[4], sociologue et historien turc. Des « fermiers et des notables turcs » qui, comme le dit Mete Tuncay[5], chef du département d'histoire de l'université Bilgi, en Turquie,  « enrichis par la saisie des biens arméniens, sont devenus la base du nouveau régime. Ils avaient intérêt à cette amnésie collective». Ceux-ci ont d’ailleurs obtenu, le 14 septembre 1922, l’annulation de la restitution des biens arméniens qui avait pourtant été décidée le 8 janvier 1920. 

La confiscation des biens arméniens, loin d’être un simple effet collatéral du génocide,  représente en conséquence son parachèvement, justifiant l’institution de « l’amnésie collective » par l’Etat et servant de base, selon Taner Akçam, à l’édification de la république kémaliste[6], 

FOCUS :

Les 30 KG d’or déposées, selon André Mandelstam[7], « en 1916 par le gouvernement turc à Berlin à la Reichsbank, et reprises par les Alliés après l'Armistice, étaient en grande partie (peut-être en totalité) de l'argent arménien. Après la déportation des Arméniens en 1915, leurs comptes courants et leurs comptes d'épargne furent transférés, sur ordre du gouvernement, au Trésor d'Etat à Constantinople  »

Ces informations proviendraient du fameux Rapport Nansen[8], et pourraient ouvrir la voie, s’ils étaient confirmés, à des demandes de restitution auprès des pays alliés, responsables du transfert de l’argent arménien vers le Turquie.

 

 



[1] Déclarations présentes dans le film négationniste turc "Terrorisme arménien" (2003) et reprises par Haytert

[2] Cité par Dickran KOUYMJIAN in « CDCA, Actualité du génocide des Arméniens »,  Kévork Baghdjian, dans  « La confiscation », pp. 204-205, convertit ces chiffres en francs de 1987 (au taux de 33,5 francs actuels pour un franc de 1919) et parvient à un total de 489 050 000 000 de francs.

[3]« Les Arméniens dans l'Empire ottoman à la veille du génocide » publié en 1992 par Raymond Kévorkian et Paul Paboudjian et repris in « CDCA, Actualité du génocide des Arméniens », «  La confiscation des biens et la destruction des monuments historiques comme manifestations du processus génocidaire » de Dickran KOUYMJIAN

[4] Citation d’un article paru dans Le Monde Diplomatique de juillet 2001 sous le titre « Le tabou du génocide arménien hante la société turque »

[5] Citation d’un article paru dans l’Express du 29/09/05 sous le titre « Turquie
La mémoire retrouvée »

[6] « C’est la raison pour laquelle ces notables se sont rapprochés du mouvement de libération nationale et ont même pris l’initiative de l’organiser eux-mêmes »

[7] Docteur en droit international, Membre de l'Institut de Droit International et Professeur à l'Académie de droit international de La Haye, cité par Shavarsh Toriguian, The Armenian Question and International Law, Beyrouth: Hamaskaïne, 1973, pp. 107-108, citant André Mandelstam, La Société des Nations et les Puissances devant le problème arménien, réédition, Beyrouth, 1970, pp. 489-493 et repris in « CDCA, Actualité du génocide des Arméniens », «  La confiscation des biens et la destruction des monuments historiques comme manifestations du processus génocidaire » de Dickran KOUYMJIAN

[8] concernant les travaux du Haut Commissariat pour les réfugiés, présenté à la quatrième assemblée [de la société des nations] en 1922.

 

Communiqué de presse du FEAJD ( http://www.eafjd.org/) du 23/11/06

CAMPAGNE DE MOBILISATION

GENOCIDE DES ARMENIENS : LA DEUTSCHE BANK DOIT RESTITUER LES BIENS SPOLIES DES VICTIMES

Plus de 20 millions de dollars volés par la compagnie allemande en 1915

Des milliers de déportés arméniens réduits en esclavage sur ses chantiers

Une procédure judiciaire engagée

La Fédération Euro-Arménienne appelle les descendants des rescapés du génocide des Arméniens, les organisations de défense des Droits de l’Homme, les responsables politiques européens et l’ensemble des citoyens de l’Union à protester auprès de la Deutsche Bank pour les forfaits dont elle s’est rendue complice et dont elle a tiré partie à partir de 1915 et jusqu’aujourd ’hui.

Il apparaît en effet qu’à l’instar de la compagnie américaine New York Life et de la compagnie française Axa, la Deutsche Bank s’est illégalement appropriée les biens des victimes du génocide et a participé à l’entreprise de dépeçage de la nation arménienne entre 1915 et 1923.

Les estimations les plus récentes montrent que les Arméniens de l’Empire ottoman avaient plus de 20 millions de dollars de l’époque en dépôt auprès de la compagnie allemande. La Deutsche Bank n’a jamais restitué ces sommes auprès des ayants droits des victimes du génocide. Pire encore, près de 30 ans avant qu’IG Farben n’exploite le travail forcé des déportés juifs de Birkenau-Monowicz, la Deutsche Bank a également employé les déportés arméniens sur le chantier de la voie de chemin de fer Berlin-Bagdad (Bagdad Bahn) dont elle était alors propriétaire. Ceux-ci ont par la suite été exterminés lors des marches de la mort qui les conduisirent dans les déserts de Syrie.

La Fédération note que la Deutsche Bank se targue par la voix de son président de remplir ses « responsabilités sociales » qui sont bien évidemment incompatibles avec l’entreprise d’extermination, d’extorsions et de dissimulation dont elle se rend complice depuis 1915.

La Fédération Euro-Arménienne rappelle également que, pour des crimes analogues, la New York Life et Axa ont été condamnées à dédommager les héritiers des victimes du génocide, et qu’une procédure similaire est en cours à l’encontre de la Deutsche Bank.

Elle appelle en conséquence les forces vives de l’Union européenne à demander à la Deutsche de se conformer à ses principes en dédommageant les ayants droits des personnes qu’elle a spoliées.

Vous trouverez un exemple de lettre ci-dessous. Les courriers peuvent être envoyés par fax en allant sur le site www.deutschebankprotest.eu , ou peuvent être adressés à :

Dr. Josef Ackermann Deutsche Bank AG Taunusanlage 12 60262 Frankfurt am Main Germany

Le 22 novembre 2006

Monsieur le Président,

Par la présente, je viens vous faire part de mon désarroi face à la conduite de la Deutsche Bank, d’une manière générale envers l’Humanité, et plus spécifiquement envers les Arméniens. En particulier, je suis choqué par la façon dont votre banque a spolié les biens des Arméniens assassinés pendant le Génocide de 1915. Je suis également scandalisé par le fait que la Deutsche Bank ait employé les déportés arméniens en tant que travailleurs forcés pour la construction du Bagdad Bahn de 1915 à 1917.

Il est répréhensible qu’une institution financière qui jouit de la confiance de ses clients viole ainsi cette confiance. Vous déclarez précisément sur votre site Web que personne ne peut ni ne doit négliger ses responsabilités sociales. Comment pouvez-vous alors vous targuer d’une telle exemplarité quand votre compagnie a fait exactement le contraire en négligeant ses responsabilités sociales envers ses propres débiteurs.

Je vous demande en conséquence de respecter vos engagements et de restituer les avoirs spoliés des Arméniens. Vous réhabiliteriez la Deutsche Bank en la dédouanant de sa mauvaise conduite passée. Il est temps pour la Deutsche Bank de suivre l’exemple de la New-York Life et d’AXA et de restituer les biens qui ont été, à tort, détenu pendant presque un siècle.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le président, l’expression des mes sentiments respectueux.

 

 

 

 

 

 

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